Il y a quelques jours, je suis tombée sur une interview de Babette de Rozières, la célèbre chef cuisinière guadeloupéenne.
On l’a tous déjà vu à la télévision française, entrain de mijoter de nombreux plats traditionnels créoles.
Je ne me suis jamais réellement intéressé à son parcours, mais j’ai toujours plus ou moins admiré, la manière dont elle mettait en avant, la gastronomie antillaise.
Mais venons-en au sujet… Lorsque je suis tombée sur l’interview dont je vous parle. J’ai été complètement bouche bée…
Je n’imaginais pas une seule seconde, que cette femme ait traversé de nombreux traumatismes et en particulier, lié à sa couleur de peau. Avant même d’être discriminé en tant que femme noire, dans un monde de blancs…
C’est la raison, pour laquelle j’ai intitulé le titre de cette manière.
Dans cette vidéo, Babette inaugure son dernier livre biographique et explique comment est-ce-qu’elle à été discriminé par rapport à sa couleur de peau, au sein même de sa famille.
Babette est donc née d’un homme noir et d’une femme mulâtresse (métisse), dont tous les deux étaient adolescents, au moment des faits. La famille maternelle de Babette était contre cette union, car la famille de son père est noire. Sa mère à tenté d’avorter, mais celle-ci à résisté…
Elle explique comment sa mère l’a abandonné à sa propre mère, car elle ne voulait pas qu’on sache, qu’elle soit la maman d’une petite fille noire. Sa mère à ensuite refait sa vie et à eu d’autres enfants, mais Babette n’était pas traité de la même façon que ces frères et soeurs.
Elle dit avoir subi des violents sévices corporelles de la part de sa mère, et était interdite de sortie, par rapport à sa fratrie.
Mais qu’est-ce que le colorisme ? : c’est un ensemble de discriminations ou de préjugés, liés à la couleur de peau. Au sein même, d’une même communauté. C’est une définition que j’ai réalisée, avec mes propres mots.
Le colorisme est un sujet assez délicat. Beaucoup de personnes ont du mal à l’aborder car il a engendré de nombreuses souffrances, chez des hommes, des femmes, des enfants, qui sont par la suite devenus, des adultes détruis, complexés…
J’ai tenu à écrire un article à ce sujet, car j’ai longtemps été témoin, d’anecdotes malheureuses, par rapport à ça. Je ne remercierais jamais assez mes parents, de m’avoir élevé avec ce sentiment d’être fière de ma couleur qui est noire.
À aucun moment, mes parents ont vénéré ou mis sur un piédestal, les personnes claires, métisses, chabines…
Et pourtant ! Dieu seul sait à quel point, ce problème était très récurrent au sein de ma famille paternelle. Pour ceux qui viennent d’arriver, je suis originaire de la Guadeloupe, du côté de mon père. Comme Babette, l’a si bien souligné dans la vidéo, la couleur de peau, le teint d’une personne est un sujet très sensible aux Antilles, et dans les familles antillaises, en général. Surtout à l’époque de ma grand-mère et de mon père (et même avant !), beaucoup considéraient, qu’être clair, c’est être beau, chanceux, ou mieux apprécié dans la société etc.
Il y énormément d’enfant qui ont été victime de railleries de la part de leurs parents ou frères et soeurs car ils étaient les seuls de la famille, à être plus foncé que les autres.
À l’école aussi, il y a eu énormément d’harcèlement scolaire lié à cela. Une collègue d’origine martiniquaise me l’a avoué un jour. Et je me souviens de sa phrase :
« On ne me laissait pas tranquille dans la cours de récréation, à cause de mon teint foncé. Ce qui m’a sauvé, c’est le fait que j’ai les cheveux un peu coulis/bouclés«
Moi déjà, j’étais la fille de « l‘Africaine » donc bon. Couleur de peau ou pas couleur de peau, on m’avait déjà casé dans une case. Par contre, je me souviens de cette cousine, plus âgée que moi qui me racontait un jour, avoir énormément souffert de sa couleur de peau. Car une de mes tantes, n’arrêtait pas de la mépriser sans cesse, lorsqu’elle était enfant. Car elle avait tout simplement, la peau noire.
Elle était enfant, elle n’avait rien demandé, elle était simplement dans l’insouciance de l’enfance, et une jeune adulte (qui était sa tante), lui reprochait tous les jours, d’être trop noire. Elle ne m’a pas caché, que cela l’a endurcie, car il a fallu qu’elle aille au-delà de ces préjugés. Elle aurait pu à son tour détester sa couleur de peau, mais cela n’a pas été le cas.
Cette tante en question, je n’ai plus contact avec elle. Mais dans la famille, je me souviens qu’elle avait la réputation d’être très complexée, de mépriser les autres (enfants comme adultes) et de vénérer les personnes claires. D’ailleurs, elle s’est même mariée avec un homme dit chabin…
Il y a pas longtemps, je discutais avec une de mes cousines paternelles dont je suis très proche. On avait abordé ce sujet par rapport aux rapports que les hommes antillais ont avec les femmes aux Antilles et celle-ci me racontait que cette même tante, lui aurait dit il y a quelques années :
« Marie-toi avec un homme qui à soit ta couleur de peau ou plus claire, mais pas plus noir. Plus noir, c’est foutu ! »
Très consciente et proche de son histoire et de ses racines. À l’heure actuelle, ma cousine est toujours si choquée des propos de notre tante. Elle ne comprend toujours pas, comment une ainée à pu lui sortir ce type de paroles, à notre siècle.
Pour vous dire, à quel point c’est une vraie question d’éducation, de confiance en soi, de mentalité…
Enfin, j’aimerais aborder un autre sujet sensible, lié au colorisme : L’ÉCLAIRCISSEMENT DE LA PEAU
J’écris ces mots, mais pour tout vous dire, je suis gênée. Je suis gênée, car j’ai honte de cela, même si ce n’est pas moi qui ait agis ainsi. Je suis gênée car cela s’est passé dans ma famille, mais je suis toute aussi peinée, car je me dis, que c’est le résultat d’une souffrance intérieur, d’un grand manque de confiance en soi, d’estime de soi…

J’ai aussi vu ces mêmes tantes, utiliser des produits hyper dangereux et cancérigènes, afin d’obtenir une couleur de peau « claire ». Et ces mêmes femmes, sont toutes originaires de la Guadeloupe, un archipel ayant connu l’esclavage et les séquelles de celui-ci. Donc le « tchoko » comme on l’appelle populairement, ne concerne pas seulement les personnes d’origine africaine !
Je me souviens d’un été où j’avais passé 2 mois en Guadeloupe. Lorsque j’ai revu une de mes tantes, je n’en croyais pas mes yeux. Celle-ci avait tellement usé de ses produits éclaircissants, qu’on ne l’a reconnaissait plus.
On aime beaucoup assimiler l’éclaircissement de la peau, aux femmes africaines. Mais il ne faut pas oublier que des femmes antillaises mais aussi des femmes asiatiques, et en particulier les chinoises ou les indiennes, décapent leurs peaux aussi. Au final, c’est un problème universel, qui ne touche pas seulement les femmes, car des hommes s’éclaircissent aussi la peau.
Je ne vous cache pas que cela m’attriste. Cela m’attriste, car ce problème est encore d’actualité. Je trouve ça tellement stupide de porter une si grande importance à une couleur de peau, plutôt qu’à l’intérieur d’une personne, de sa personnalité, de ce qu’il renvoie ou de l’impact positif qu’il peut avoir.
À cause de cela, des personnes mettent leur vie en danger avec des méthodes bien dangereuses. Et en plus de ça, nous avons à faire à des personnes qui méprisent, mais qui ne se sont jamais accepté au final.
Je ne remercierais jamais assez mes parents, de ne m’avoir jamais jugé sur mon physique. Surtout mon père qui a grandi dans une famille ou le colorisme à énormément fait souffrir. Car je sais qu’un enfant qui a été sans arrêt jugé par ses propres parents, c’est un enfant qui devient un adulte souffrant.
En tout cas, merci Babette d’avoir soulevé cette problématique. J’imagine que se replonger dans ces souvenirs douloureux, n’a pas été facile. Mais je suis de celle, qui pense qu’il est nécessaire de communiquer, sur ces réalités qui détruisent encore nos sociétés.
Pour ceux qui cherchent la définition du mot « chabin », j’ai trouvé ce lien: http://100-pour-cent-antilles.com/chabine-mulatresse-et-creole-lorigine-insultante-de-ces-mots
C’est un mot qui est encore très controversé aujourd’hui. Personnellement, je n’ai pas de problème avec ce terme, donc je l’utilise quand je veux l’utiliser. Je reconnais aussi, qu’il est plutôt devenu banal comme expression.